Médicis
Au premier abord, la pétition engendrée contre la nomination de deux artistes en tant que pensionnaire de la villa Médicis, l'une des prestigieuses enseigne du savoir-faire culturel français représente à peine plus qu'une tempête dans un verre d'eau et une querelle de chapelles entre les tenants de la "musique contemporaine" estampillée comme telle et les musiciens de la "musique actuelle", un terme inventé pour complaire aux investisseurs et au collectivités, mais qui est tellement flatte-couillon qu'elle permet tous les amalgames. Autant le dire, ça sent l'ergotage.
Pour définir -si c'est possible- les musiques actuelles, disons qu'est actuel tout ce qui n'est pas ancien, à condition que ça
fasse vendre des places. Ainsi, le Rock est "actuel" ce qui laisse
sous-entendre que Jauni Hallidai est plus "actuel" qu'un compositeur de
musique contemporaine de 25 ans qui ferait de l'expérimentation
électronique.
Autant dire que non seulement les termes ne veulent plus
rien dire, mais surtout que, comme toujours, les faiseurs d'étiquette
sont de rances cuistres ; la notion de musiques
actuelles est un cadre du Ministère de la Culture aussi pertinent
qu'un bonnet de ski au Sahara. Ce genre de "labels" n'est qu'une réponse boutiquière qui rejette la sincérité et le propos comme portion congrue d'une politique culturelle globale. Au delà, ce qui
est dommage, c'est que cela permet à toute une frange de s'égosiller sur
la vacuité de subventionner des musiques et des artistes... Ou comment se tirer une balle dans le pied et offrir clés en main des relents poujadistes...
Cette pétition, que l'on peut lire ici, dénonce la
nomination de deux artistes de "musiques actuelles", avec toute la
mauvaise foi que peut représenter le terme, en lieu et place d'un
compositeur de "musique contemporaine", c'est à dire de musique de
recherche, ardue, complexe, esthétique, dans la tête de celui qui a
utilisé la dichotomie à dessein. Les deux artistes sont deux musiciens très disparates mis dans le même bain au regard de leur non-appartenance à un cercle fermé. Il s'agit de Claire Diterzi et de "magic" Malik Mezzadri... Sans rien dire sur Diterzi, s'il est question de composition, de musique écrite et d'intransigeance, le dossier de Malik ne pouvait qu'être reconnu !
Sans aller aussi loin que JJ Birgé, on est en droit se poser cette question : si au delà de leur dénonciation boutiquière les auto-déterminés "contemporains" signataires ont entendu le travail de Mezzadri, et celui de Gilbert Nouno, notamment avec Octurn... La question suivante poindra de suite : dans quelle mesure il ne s'agit pas avant tout d'un problème de Classe ? Allons plus loin : dans quelle mesure cette réaction tristement attendue ne fait pas le bonheur d'un gouvernement à la délétère politique culturelle ? Sauf à devenir soi-même un peu boutiquier, on est en droit de se poser la question de l'intérêt de ce débat, plutôt que d'évoquer, par exemple, les crédits culturels des "Alliances Françaises" qui diminuent au soleil, ce qui semble bien plus inquiétants que les querelles de cours pour la gloire d'une adresse culturelle en déclin... Pour être provocateur, on dira que l'on attend même depuis longtemps un digne successeur à des génies ouverts sur le monde comme Luciano Berio, qui revisitait la musique populaire et créait avec des jazzmen avec génie, sans s'avilir à des querelles de cour(tisan) de récré !
Quelle est triste cette querelle, car elle se base plus sur les mots, les maux, et la triste nécessité de se comparer non pas sur la qualité et la vitalité de la création musicale, mais bien seulement sur des termes factices qui accentue les divisions et permettra les pires coupes sombres au nom d'une éventuelle déconnexion des réalités... La fameuse pétition est d'ailleurs tout à fait symptomatique d'un malaise : désengagement de l'Etat, rejet du commercial, insistance sur la nécessité de l'Education... On ne pourra que partager le même constat
Mais ce n'est pas en tirant à vue sur les collègues que cela fera évoluer les choses. D'autant que la Villa Médicis est un débat germanopratin d'arrière-garde d'une absolue vulgarité à l'heure où le blé est sous la grêle. l'attaque n'est pas seule portée envers les musiciens contemporains. Elle est générale et tout ceux qui croiront défendre leur peau en défendant leur boutique se tireront une balle dans le pied...
Et une photo qui n'a strictement rien à voir... De celle que vous êtes plusieurs à attendre...